FRANCE – ENTRETIEN AVEC LE JUIICE
Le Juiice est plus qu’une musicienne. Son identité est empêtrée dans son expression artistique, et elle ne recule pas devant les dures vérités de la vie. Au lieu de cela, elle les explore à travers sa musique. Chaque mot et chaque lyrique est un moyen pour elle de transformer la réalité en art. « J’exprime mes pensées et mes émotions et cela se transforme en ondes sonores. C’est très spécial ».
Le monde magnifiquement construit de Le Juiice tourne autour de l’estime de soi, de la culture et de l’art sous toutes ses formes. Pour la rappeuse franco-ivoirienne, âgée de 28 ans, les ailes de sa musicalité se sont déployées un peu par hasard et par la suite ont pris forme au travers de différentes prestations et de freestyles, « La musique est arrivée dans ma vie de manière progressive un peu comme l’on s’endort et dans la même année tout s’est enchainé et l’EP Trap Mama a été le déclic » se confie t-elle. Changeant de scénario tout en restant fidèle à sa philosophie, elle a adopté la musique comme forme d’expression de soi « C’est un bel outil permettre aux gens de percevoir la musique différemment et plus sincèrement, confie-t-elle à Black Square.
« En tant que fille d’immigrés, les mélanges culturels entre la Côte d’ivoire et le 94 (Val de Marne) ont été d’une grande inspiration comme une grande sauce dans laquelle je puisse une grande partie de mes idées »
Derrière la musique, nous avons une artiste profondément inspirée par les mondes qui l’ont façonnée, « En tant que fille d’immigrés, les mélanges culturels entre la Côte d’ivoire et le 94 (Val de Marne) ont été d’une grande inspiration comme une grande sauce dans laquelle je puisse une grande partie de mes idées ». Mais comme tout artiste, ce sont ces doutes qui nourrissent ces textes, cette soif de réussite au milieu de tous, mais également son histoire « prendre du recul est très salutaire, avoir de la profondeur est très important pour moi, j’aimerai laisser une vraie trace dans la musique». Son arrière-plan transitoire est la raison pour laquelle La Trap Mama occupe si facilement la place et résonne comme un espoir dans les ténèbres , «on va entrer avec violence, et je suis obligée de parler de violence car ma vie est faites de violence et il faut de la force pour le faire», dit-elle. Peu importe où elle va, l’expression de soi, de la noirceur dans sa vie est ce qui « fait vraiment d’un endroit un chez-soi », dit-elle. «Une grande partie de mon travail est centrée sur la façon de renforcer ou de guérir ou d’ajouter de la valeur à ma culture et à mon peuple. J’ai l’impression que c’est tellement important », explique-t-elle.
Fièrement indépendante, Le Juiice a attiré un véritable public de soutiens, captivés par sa langue habile, son humour plein d’esprit et son discours sans vergogne. Ses paroles brossent le tableau d’une vie sans hommes problématiques, déterminés à récupérer ce qui vous appartient vraiment et à embrasser votre sexualité, « j’ai un rapport affectif à l’argent, mais on sait tous que c’est l’argent qui dirige le monde »
L’importance ne réside pas simplement dans l’authenticité du message mais aussi dans celle de la messagère. Dans un monde où les appels à la positivité et à la foi sans faille ont énormément d’échos, Le Juiice s’inscrit dans une lignée plus terre à terre.
Ses morceaux racontent l’histoire de malheurs réels et la dynamique de sa féminité. Néanmoins, La Trap Mama n’est là pour être votre sauveuse « Ma musique est tout à propos de moi. Je ne suis la mère de personne, je suis très égoïste quand il s’agit de mon art. Je ne suis pas là pour sauver qui ou quoique se soit ».
«Une grande partie de mon travail est centrée sur la façon de renforcer ou de guérir ou d’ajouter de la valeur à ma culture et à mon peuple. J’ai l’impression que c’est tellement important »
C’est peut-être cette approche égoïste de la musique qui l’a aidé à créer une discographie si pertinente qui raconte des histoires réelles de lutte et de douleur, en particulier en ce qui concerne sa carrière. Avec des paroles qui s’adressent à n’importe qui et avec cette cohérence vient la narration non filtrée d’une fille, qui n’abandonne jamais qui elle est pour réussir, un peu à l’image de sa prestation sur scène « j’aime quand ça castagne » dit-elle.
Assez aisément, elle décroche une place de choix parce qu’elle n’essaye pas de plaire, elle reste elle-même, telle une jeune femme du 94 voulant juste vivre et faire de la musique entourée de sa même bande de potes .« Avec le l’arrivée du COVID, j’ai eu le temps d’entrevoir la porte du succès et aujourd’hui avec ma musique j’aimerai transmettre une ode à la joie et surtout la force ». Le Juiice est plus ambitieuse que jamais et prend le prochain chapitre de son histoire en main.
Pour finir, nous vous laissons en musique avec le titre “Jusqu’à la mort”