JAMAÏQUE – L’ÉCLECTIQUE ET SÉDUISANT GIFTED DE KOFFEE

JAMAÏQUE – L’ÉCLECTIQUE ET SÉDUISANT GIFTED DE KOFFEE

Été 2020, la jeune artiste jamaïcaine Koffee a sorti son single “Lockdown” et a rêvé de la vie après la pandémie. “Où irons-nous / Quand la quarantaine sera-t-elle terminée et que tout le monde touchera la route ?” Laissant son imaginaire à la dérive sur un avenir délaissé des soirées “FaceTime”. Cependant, la fin anticipée de l’isolement s’est dégonflée comme un ballon de fête. Plutôt que de languir dans ses pyjamas, Koffee s’est mise au travail : Gifted, son premier album postérieur de son EP Rapture,- lauréat d’un Grammy-, est par définition un album pandémique, imprégnant l’ennui et l’incertitude de cette époque d’une positivité qu’on se doit d’utiliser à bon escient.

La carrière relativement courte de Mikayla “Koffee” Simpson est une histoire de bien-être sur une étoile montante : une YouTubeuse de Spanish Town, en Jamaïque, découverte à 17 ans après qu’Usain Bolt lui ait publié son hommage, “Legend” ; collaborer avec des héros du reggae du millénaire comme Chronixx et Protoje et signer sur un label majeur à 18 ans ; remportant le Grammy du meilleur album de reggae à 19 ans, pour un EP de cinq chansons dancehall, son premier, faisant d’elle la plus jeune personne et la seule femme à mériter une telle distinction oui rien que ça. Une telle démonstration de force ne fait que renforcer l’idée que Koffee est l’une des artistes les plus douées de sa génération et que son empreinte risque de hanter pendant longtemps ses futurs successeurs.

« Gifted » n’est jamais clivant, ni même égocentrique. Toute son ambition naturaliste réside dans l’observation de son propre reflet, au travers de son environnement. Et tout en abordant des sujets aussi profonds que la complicité du gouvernement jamaïcain dans la pauvreté structurelle et la violence armée, avec une maestria sans précédent. En combinant des influences traditionnelles comme les guitares acoustiques en tonalités majeures avec la diaspora contemporaine, il est à coup sûr son œuvre la plus personnelle et la plus maîtrisée de sa discographie. 

Naviguant du dancehall contemporain de sa renommée antérieure à un royaume plus aéré du reggae roots, il est légitime de se demander si Koffee ne vient pas d’exploser en plein vol, abattue par le poids d’une ambition démesurée subtilement dissimulé aux yeux de tous. Pourtant, l’arrière-goût laissé par ces dix titres est loin d’être amer. Au contraire, l’œuvre ne se laisse apprivoiser qu’avec du temps, de l’acharnement et suffisamment de confiance pour se laisser guider par une narration qui suit l’évolution des questionnements de la jeune artiste. 

Ses questionnements, elle les exprime sur Defend, soit l’exact opposé du bienheureux Shine. Le rythme décontracté de West Indies, avec son outro vissé, ressemble au souvenir joyeux d’une fête rejouée au ralenti, un contrepoint romantique au rock amoureux de Lonely. Il y a une nuance fière et pure dans sa musique, notamment à cause de son timbre vocal, qui donne l’impression qu’elle est aussi ouverte d’esprit et de cœur.

Malgré les deux dernières années qui ont concentré ses pensées vers l’intérieur – comme elles l’ont fait pour beaucoup d’entre nous – Koffee, maintenant âgée de 22 ans, est plus sûre de son talent et de ce qui compte le plus pour elle, comme le suggère la chanson titre, Gifted. Sa musique édifiante peut avoir tendance à gratter plutôt qu’à inspirer, mais Koffee atteint un point médian satisfaisant, sans didactisme et jamais forcé ; elle nous invite simplement dans son monde et il y fait beau.

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