FRANCE – JE SUIS VOTRE PIRE CAUCHEMAR
Autrice: Lakozery
« Je suis votre pire cauchemar », être une femme noire et grosse, ce n’est pas une mince affaire ! : les courts écrits d’une lectrice
La perfection n’est pas une expérience humaine. Retenez ceci ! Si vous souhaitez ne retenir qu’une seule chose, c’est bien celle-là.
Nous agissons de façon diamétralement opposée.
Nous voulons la silhouette parfaite, les fesses parfaites, le ventre parfait, un summer body on fleeeeeek. Mais, qui donc a déterminé ce que devait être Le summer body ? Pourquoi partons-nous si ardemment à sa conquête chaque année ?
Bien… Nous considérons nos corps comme des « corps-ennemis ». Un corps-ennemi avec ses imperfections, des éléments manquants. Cela dit, ne sommes-nous pas Humain-es ? Des formes, des bourrelets, les rides, la cellulite : la hantise pour beaucoup de femmes. Nous sommes embolisées par cette image du corps parfait que nous renvoie la société. Car, disons-le, nos corps imparfaits sont constamment mis en relief par les réseaux sociaux, les campagnes publicitaires, le regard des autres, celui des hommes. Nous sommes ci et là, consciemment ou inconsciemment à la recherche d’une quelconque validation masculine dans cette société patriarcale et esthétiquement eurocentrée. Cela traduit un profond manque de confiance en nous-mêmes mais aussi et surtout le besoin d’approbation. Cette approbation nous permettrait-elle de nous accepter pleinement, de confirmer notre statut de plus ou moins bonasse ? Peut-être. Pour un temps seulement. Quand viendra celui de l’acceptation, du non jugement et sous quelles conditions ?
Parce que oui, au-delà même du corps, nous sommes entrainées, entre femmes, à nous comparer et perpétuer des mécanismes d’oppression : position financière, statutaire, maritale. Dans le prolongement de ces réflexions, force est de constater que les corps gros sont pointés du doigt. Tout ce qui est gros est considéré comme moche, non désirable, en mauvaise santé, moins attractif sur le marché de l’emploi. Coucou les grossophobes ! Autrement encore, le corps noir est stigmatisé, trop noir, ayant des cheveux trop afro. Coucou les racistes et les coloristes !
Assez !
Dans son ouvrage, Kiyémis aborde l’importance de construire une société émancipée. Car, aujourd’hui encore, être une femme noire et grosse, c’est être victime de grossophobie et de racisme. C’est être jugée sur sa santé, son alimentation, son activité physique, son physique, sa façon de se vêtir, se comporter, au sein même d’une société normée et ce dès le plus jeune âge. Mais, qu’est-ce que la norme au juste ? Une norme au travers de laquelle la beauté devient sacrificielle. Une norme qui répond à des diktats. Mais, ne sommes-nous pas des Humain-es ?
Malgré nous, nous désirons parfois plus que tout répondre à cette norme. Ainsi, les femmes sont les plus touchées par ces mécanismes d’oppression. La sororité est une manière d’y répondre. Le mouvement afroféministe est une manière d’y répondre. Se retrouver entre femmes est une action émancipatrice. Toilettes de boîtes de nuit, associations, espaces virtuels, autant de lieux où peuvent s’exprimer la joie collective, l’insouciance, les corps et existences multiples. Être solidaire est clé. S’accorder de l’indulgence en est une autre. Dans la quête d’une société émancipée, sachons reconnaître que les personnes prenant part à cet idéal portent également en elles leurs propres traumas, doutes, hontes, insécurités. Sachons accueillir cela. De toute évidence, le poids de la société ne s’efface pas comme l’éponge efface la craie sur un tableau d’école. Il nous appartient de converger main dans la main et mener cette lutte ensemble, de se rassembler pour vivre nos vies à nos images.
La perfection n’est pas une expérience humaine. Je me raccroche à cette phrase puissante de l’ouvrage « Je suis votre pire cauchemar » écrit par Kiyémis, poétesse, écrivaine, blogueuse, militante afroféministe, grosse et noire, qui appelle à la liberté des corps et des esprits, à l’émancipation et l’acceptation de soi dans la plus grande intimité de ce qu’est le corps. Un appel à être indulgents et voir la norme autrement. Puisque finalement, il n’y en a pas. Nous la créons. Pauvres de nous.
Libérons-nous !